Séance de Rentrée académique 2018 : Allocution de Martine Evraud, représentant le personnel administratif, technique et ouvrier


Rentrée académique de l’Université de Liège

20 septembre 2018

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Recteur,
Mesdames et Messieurs en vos titres et qualités,
Chers collègues,
Chers amis,

0102-RA2018La violence...

La violence est partout, dès notre naissance, au premier cri, et jusqu'à notre mort. Elle parcourt l'histoire et,malheureusement, contribue trop souvent à l'écrire. Elle suinte de la plus anodine des activités, sous les préaux, dans la rue, au travail, dans les hémicycles, … la violence est incrustée dans notre quotidien.
Nous observons aujourd'hui une montée des discours sur la violence et leur banalisation. Violence faite aux enfants, violence faite aux pauvres, violence faite aux femmes, violence faite aux travailleurs, la violence faite à ceux qui s'opposent au système … violence faite à « l'autre », violence de toute part, à tout propos, à tout un chacun.
Toutes ces violences existent. Elles ne surgissent pas d'une sorte de mode de la victimisation. Et ceux qui le prétendent se rendent coupables d'une nouvelle forme de violence en dépouillant les victimes d'un statut que pourtant elles n'usurpent pas.
Les violences existent depuis longtemps, mais leur incrimination publique s'intensifie, tantôt condamnées, tantôt justifiées voire légitimées.
C'est surtout parce que la violence est devenue un moyen privilégié pour communiquer. Voire parfois LE SEUL moyen.
Comme si la violence avait remplacé toute autre forme de communication, comme si la concertation était devenue un moyen obsolète et la diplomatie une convention désuète, comme si la discussion était considérée comme une sorte de mauvaise habitude.
Comme si le dernier stade du dialogue avait été atteint, épuisé, et qu'il reste seulement ce que Clausewitz appelait la prolongation naturelle de la politique, c'est-à-dire la guerre, rien de moins.
La violence est intolérable et il ne faut pas la taire. Il faut en nommer toutes les formes.
Ne pas en parler ou refuser de la voir ne peut que l'encourager et la servir.
Que ce soit dans les familles, dans la rue, sur nos bancs publics, au bureau ou dans le parc Maximilien. Elle doit être dénoncée !
Mais il ne faut pas s'imaginer que dénoncer la violence suffit à la faire disparaître, ni même à la réfréner.
Et il ne faut pas s'imaginer non plus que défendre et protéger les victimes de la violence sera suffisant pour la faire reculer. Même si cette protection et cette défense sont un devoir.
Les mécanismes de la violence sont aujourd'hui bien connus, de même que ses motifs et même ses justifications voire ses légitimations notamment par le pouvoir en place.
La principale justification de la violence, de la fin des pourparlers, de la cessation des négociations, des débats et de la concertation, c'est la vitesse utilisée comme moyen dans l'imposition du pouvoir.
Il faut faire vite !
Il faut emporter le morceau le plus rapidement possible, à la hussarde s'il le faut, pour imposer notre projet, pour imposer notre pouvoir, quel qu'il soit.
Et cette méthode brutale, qui était naguère encore l'apanage des kamikazes et considérée comme délirante, cette méthode violente s'est banalisée depuis le monde des affaires avec ses O.P.A. cavalières jusqu'au monde politique où il suffit à présent de slogans, et non plus de programmes, pour s'imposer.
Si nous voulons une alternative à la violence, qui s'insinue partout dans les rapports humains, il nous faut un outil.
Et cet outil existe.
A côté de la famille et du travail, il y a un lieu qui permet toutes les expérimentations. Et ce lieu, le troisième lieu ou « tiers lieu » selon le sociologue Ray Oldenburg, nous devons le construire ou le reconstruire au sein de l'université.
Pour pacifier la société, pour réduire les inégalités, pour faire reculer le racisme et l'exclusion, pas d'endroit plus fécond, pas de lieu plus diversifié, pas de momentum plus ouvert et plus central à la fois que l'université.
Nous pouvons et devons réhabiliter l'art de la confrontation verbale argumentée et faire reculer les attitudes autoritaires non raisonnées.
Car c'est cela, la violence : une attitude autoritaire non raisonnée.
Pour en finir avec la violence, et s'il y a une ambition nécessaire, c'est bien celle-là, c'est à l'université qu'il faut tenter l'expérience la plus intéressante qui soit, je veux dire l'intelligence.
Contre la violence, tentons l'intelligence. Tous ensemble !
Je vous remercie.

Pour le personnel administratif, technique et ouvrier de l’Université de Liège,
Martine Evraud

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Rentrée académique 2018 : Allocution de Martine Evraud, représentant le personnel administratif, technique et ouvrier

Discours de Martine Evraud, représentante du personnel administratif, technique et ouvrier, prononcé lors de la cérémonie de Rentrée Académique, le 20 septembre 2018.

modifié le 04/04/2024

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