Euclid, un télescope spatial européen pour révéler l’Univers invisible…


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credit : ESA/Euclid/Euclid Consortium/NASA. 

Le télescope spatial Euclid, dont la mission est de sonder l’expansion de l’univers et la matière noire, a été lancé depuis la base de Cap Canaveral (USA) ce samedi 1er juillet en fin de journée. Cette nouvelle mission de l’ESA implique de nombreux acteurs majeurs du spatial en Europe, dont le Centre Spatial de Liège (CSL) qui a testé une partie des instruments, et des astrophysiciens de l’ULiège qui feront partie de l’équipe qui analysera les données envoyées par le télescope.

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élescope de l’agence spatiale européenne (ESA), Euclid a pour mission de révéler les propriétés et la nature de la matière noire et de l’énergie sombre, soit 95% du contenu de l’Univers. Pour la première fois, Euclid effectuera un relevé de plusieurs milliards de galaxies. Cette cartographie d’une précision inédite permettra de comprendre comment s’est structuré l’Univers, du Big-Bang à aujourd’hui.  Un nouveau projet spatial auquel ont contribués des chercheurs et ingénieurs de l’Université de Liège. D’abord au Centre Spatial de Liège (CSL) ou le télescope a été placé en cuve afin de simuler les capacités d’Euclid à résister au conditions drastiques du vide stellaire. Ensuite, à l’Institut d’Astrophysique de l’Université de Liège où des astrophysiciens analyseront les données envoyées par Euclid à partir de novembre 2023.

L’ingrédient “magique” de l’Univers

Découverte en 1998, l’accélération de l’expansion cosmique demeure encore largement incomprise.  Son origine physique nous échappe. Est-ce “simplement” la constante cosmologique introduite puis reniée par Einstein?  Est-ce une nouvelle interaction physique à découvrir?  A moins qu’il nous faille un théorie modifiée de la gravitation pour décrire l’infiniment grand? En étudiant son influence sur la distribution des galaxies, la mission Euclid nous aidera à comprendre la nature de cette énergie sombre qui domine le cosmos depuis cinq milliards d’années présidera au destin ultime de l’Univers.   

Mystérieuse matière noire

Elle est invisible et sa nature est encore aujourd’hui inconnue, mais ses effets gravitationnels sont observables.  Elle joue un rôle majeur dans la formation des grandes structures de l’Univers.  Grâce à Euclid, les chercheurs belges étudieront les propriétés de la matière noire dans les galaxies naines ainsi qu’aux échelles cosmologiques.  Une attention particulière sera donnée à un candidat, les trous noirs primordiaux qui pourraient s’être formés à partir de grumeaux dans la soupe primordiale, moins d’une milliseconde après le Big-Bang.

shutterstock composition of the universe

Diagramme représentant la composition de l’Univers. L’énergie sombre (68%), la matière noire (27%) sont les ingrédients dominants dont la nature est inconnue. En cartographiant l’Univers sur les 12 derniers milliards d’années, Euclid tentera d’en révéler la nature.

Remonter jusqu’au Big-Bang

Même si les observations directes d’Euclid concernent les galaxies présentes dans l’Univers au moins deux milliards d'années après le Big-Bang, leur distribution statistique permettra de contraindre les inhomogénéités primordiales apparues une infime fraction de seconde après le Big-Bang. Une mine d’information inestimable pour sélectionner les modèles viables d’inflation cosmique, pour sonder l’histoire primordiale de l’Univers, l’existence de particules inconnues ou pour mesurer pour la première fois la masse des neutrinos.

Lentilles gravitationnelles, ou l’Univers sous la loupe de la matière noire

La matière noire dans l’univers peut dévier les rayons lumineux des galaxies lointaines, qui nous paraissent déformées.  Cet effet physique peut devenir un outil pour sonder les propriétés et la granularité de la matière noire dans les galaxies.  La matière noire devient ainsi un outil, un microscope pour observer des galaxies lentillées très lointaines, afin de mesurer le taux d’expansion de l’Univers ou sonder l’existence de trous noirs primordiaux…    La vision aiguisée d'Euclid révèlera ainsi des détails sur la structure d'un échantillon inédit de galaxies. Les caractéristiques des galaxies les plus massives nous permettront de sonder plus en profondeur les mystères de leur formation et de leur évolution, tandis que les galaxies naines nous permettront de sonder les propriétés de la matière noire à plus petite échelle.  « Grâce à ses caractéristiques, Euclid est un formidable découvreur des lentilles gravitationnelles. Il devrait nous permettre de découvrir dix fois plus de systèmes que ce que nous en connaissons actuellement ! Cela permettra un bon en avant incroyable dans la connaissance du contenu en matière sombre des régions centrales des galaxies, se rejouit Dominique Sluse, astrophysicien au sein du Laboratoire ORCa (Unité de recherches STAR / Faculté des Sciences) de l’ULiège

Examen “médical” pour Euclid  au Centre Spatial de Liège (CSL)

Une fois lancé, pas de retour possible. Il était donc indispensable de tester et vérifier les capacités d’Euclid à affronter le vide spatial tout en gardant son acuité visuelle.  Le CSL a été désigné pour réaliser cet “examen médical”, soit près de 60 jours de tests intensifs sous vide, réalisés en 2021.  Comme pour d’autres missions spatiales, l’expertise unique du CSL dans ce domaine a contribué à vérifier et garantir les performances du télescope dans l’espace. « Trois grands challenges ont été relevés pendant cette campagne, explique Christophe Grodent,  ingénieur civil électromécanicien, directeur commercial et membre du conseil de guidance du CSL. Tout d’abord, il a fallu s’assurer de la compatibilité de la cuve Focal 5 (5m de diamètre) avec les dimensions de l’instrument et de ses moyens de mesures au sol, cela s’est joué au centimètre près ! Ensuite, le refroidissement de l’environnement à -260°C sur une telle surface a exigé une optimisation parfaite du set-up d’essai afin de réduire au maximum les pertes thermiques. Enfin, des précautions spécifiques ont été prises, lors des phases de réchauffement, pour éviter tout risque de contamination moléculaire. »

Euclid CSL (c) CSL:ULiege

Le télescope spatial Euclid, de passage au Centre Spatial de Liège pour des essais sous vide, en 2021. ©CSL/ULiège

Les scientifiques se réjouissent déjà des données qui devraient arriver envoyées par le télescope dès novembre 2023, lors de son arrivée au point de Lagrange L2.

Vos contacts à l’ULiège

Christophe Grodent

Dominique Sluse 

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